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Hom Nguyen est reconnu pour ses portraits grand format où il explore l’âme humaine avec intensité. Rencontre avec un peintre chez qui l’art puise sa source dans la résilience .

Vous êtes franco-vietnamien. Quel est l’impact de votre histoire familiale sur votre art ?

 

Hom Nguyen Je suis né en France en 1972 de parents « boat people ». J’ai traversé beaucoup d’épreuves avant de devenir qui je suis aujourd’hui. À 14 ans, j’ai perdu mon père d’adoption et suis devenu chef de famille. J’ai dû m’occuper de ma mère devenue paraplégique suite à un accident de voiture.

 

Pour m’évader, je passais beaucoup de temps dans la rue. J’ai connu la solitude et la pauvreté mais j’ai été porté par des valeurs telles que la dignité, la sagesse, la bienveillance, la notion de droit chemin, et la reconnaissance pour l’acceptation de la France. Sans cette histoire douloureuse, et bien sûr sans les rencontres, je n’en serais jamais arrivé là.

Vous avez été vendeur de chaussures avant de devenir « le prince de la patine » ?

 

H. N. Pour subvenir aux besoins de ma famille, j’ai travaillé comme cireur, puis vendeur de chaussures. Très vite, j’en suis venu à la patine de souliers, une pratique de restauration et de coloration du cuir. Après avoir peaufiné ma pratique par des stages auprès de tatoueurs au Japon et travaillé pour des maisons de luxe, je me suis installé en autoentrepreneur en 2009.

 

Puis la chance de ma vie est arrivée ! La rencontre d’un mécène m’a permis de m’installer dans un atelier à Bagnolet [ndlr : l’atelier de l’artiste se trouve aujourd’hui à Saint-Ouen]. Là je me suis mis à la peinture.

Toutes vos œuvres sont des portraits grand format, voire monumentaux. D’où viennent-ils et que racontent-ils ?

 

H. N. Ils viennent de mon imaginaire et racontent mon histoire, celle de ma mère (décédée en 2009), des peuples en migration, de l’exode en général, des parcours singuliers en miroir de mon propre parcours.

 

En ce sens, mon travail est introspectif autant qu’universel. J’aime révéler des choses que l’on ne voit pas. C’est comme dans un arbre : il y a l’écorce mais aussi la sève.

 

Il faut aller creuser à l’intérieur pour voir. J’essaye de faire émerger les expressions et les mouvements de l’âme, la face cachée. « Sans repères », « Ligne de vie », « Trajectoire »,«Inner Cry », ces titres d’exposition expriment ma vie.

Vous êtes un peintre autodidacte. Des artistes vous ont-ils influencé ?

 

H. N. Je n’ai pas fait d’école, mais je dessine depuis l’âge de 5 ans et je peins depuis mes 8 ans. Mes sources d’inspiration sont aussi bien Jackson Pollock que Alberto Giacometti. Lucian Freud et Francis Bacon me fascinent par leur puissance d’évocation.

 

Quand je sens que quelque chose de sincère me traverse, je me lance. Je peins par instinct et par émotion, sans esquisses ou dessins préparatoires.

Vous réalisez aussi des portraits de célébrités ?

 

H. N. J’ai commencé par des chanteurs et des acteurs (Mick Jagger, Serge Gainsbourg, Jack Nicholson, Sophie Marceau), puis des politiques (Nelson Mandela, Gandhi, John F. Kennedy, Michèle Obama). Ce n’est ni leur beauté ni leur notoriété qui m’interpelle mais leur expression, les sentiments et les émotions que l’on perçoit, et bien sûr leur histoire.

 

Aujourd’hui je préfère la représentation de visages anonymes. Je réalise aussi des commandes pour l’AP-HP comme la fresque d’Édith Piaf qui orne la façade de l’hôpital Tenon où elle est née.

 

J’ai réalisé un portrait de l’Abbé Pierre, de Napoléon que j’ai exposé à Calvi lors de son 250e anniversaire.

Votre pratique du dessin est particulière ?

 

H. N. Mes dessins sont des gribouillages faits d’intersection et d’accumulation de traits, des lignes de vie.

 

Chaque trait est une trajectoire et chaque trajectoire, en s’additionnant, en se croisant, forme bien plus qu’un visage… Un paysage. Et je pratique le « dripping »(1) de peinture.

Vous êtes engagé auprès de l’association Enfants du Mékong. Pourquoi ?

 

H. N. J’ai besoin de faire le pont entre mes racines et la France. Je voyage beaucoup dans les pays asiatiques. Lors d’un voyage au Cambodge j’ai découvert l’association à qui j’ai proposé de donner bénévolement des cours de dessin. La rencontre avec ces enfants m’a bouleversé. Ils n’ont rien mais s’accrochent avec une énergie incroyable en eux. Une vente aux enchères de mes tableaux a permis de récolter 224 000 €, de quoi financer des cours et les repas de 750 enfants pendant un an.

 

Transmettre est essentiel. J’ai animé pendant quatre ans un atelier d’art-thérapie pour des enfants et des adolescents du service psychiatrique de la Pitié-Salpêtrière.

Pourquoi avoir choisi la Caisse d’Epargne Ile-de-France ?

 

H. N. C’est une banque qui représente mes valeurs, la mutualisation, le partage, la confiance ainsi qu’un côté «modeste » que j’apprécie beaucoup. Ce n’est pas une banque bling-bling.

Quels sont vos projets ?

 

H. N. Une exposition à Ho Chi Minh, la réalisation d’un immense portrait de l’Abbé Pierre pour sa fondation, une collaboration avec Franck Muller pour la réalisation d’une collection de montres uniques, la création d’une œuvre pour la fondation Focal (Fondation de formation continue pour le cinéma et l’audiovisuel).

DATES CLES:

 

  • 2015 Grand Palais Paris, Art Paris
  • 2017 Musée Massey Tarbes, exposition personnelle
  • 2019 Musée des Arts de la citadelle de Calvi, exposition personnelle
  • 2019 Hôpital Tenon, Paris, Édith Piaf, œuvre permanente
  • 2021 Exposition collective « Artistes à la Une Togeth’Her » à la Monnaie de Paris

1. Le dripping est une technique consistant à laisser couler ou goutter de la peinture, ou à projeter celle-ci sur des toiles ou surfaces horizontales.

 

Instagram : @homnguyen

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